Emmaus International

Dans une série d’interviews, Emmaüs International souhaite partager le point de vue de ses membres sur la pandémie Covid-19 et ses impacts sur le Mouvement à travers le monde. La parole est donnée à Luis Tenderini, Elu de la région Amérique au Conseil d'administration d'Emmaüs International. Nous l'avons interrogé sur la réaction des Brésiliens face à l'opposition de Jaïr Bolsonaro de suivre les consignes de l'OMS, sur l'adaptation de la population face à la crise, ainsi que sur l'impact de l'éducation libératrice sur l'analyse polique des jeunes en temps de crise sanitaire.

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Au Brésil, pays où est situé ton groupe Emmaüs, le président Jaïr Bolsonaro s'oppose aux consignes de l’OMS et aux mesures de confinement. Quelle est la réaction de la population par rapport à cette attitude, que beaucoup estiment être un calcul politique ?

La majeure partie de la population brésilienne ne cautionne pas le comportement irresponsable du Président. Dans le même temps, de nombreuses personnes ne respectent pas le confinement strict qui a été imposé par les autorités locales. Une grande partie de la population ne reçoit pas l’aide apportée par le gouvernement car le système bancaire est défaillant, tout comme le système de santé publique, qui ne permet plus de fournir les soins nécessaires. L’augmentation progressive du nombre de personnes infectées et de décès laisse entrevoir la possibilité d’une tragédie nationale, où les personnes les plus touchées seraient les plus pauvres.

Les groupes Emmaüs au Brésil sont très fortement impliqués dans le tissu social des communautés où ils se trouvent, notamment dans le cadre de leurs actions d’éducation. Comment les populations locales s’adaptent et traversent cette période de crise ?

En ces temps de crise, les inégalités sociales semblent s’être creusées. Les classes sociales les plus riches sont celles qui respectent le moins le confinement, car elles ont les moyens de vivre sans les limites imposées par la pandémie. Ce sont aussi ces personnes qui soutiennent les positions anti-confinement du Président. Les classes sociales les plus pauvres tentent de survivre, en encourageant et bénéficiant d’initiatives solidaires qui voient le jour dans différents lieux. Les difficultés pour recevoir l’aide du gouvernement pénalisent encore davantage la précarité de milliers de familles.

Les groupes Emmaüs de la région Amérique, et notamment le tiens à Recife, mènent depuis longtemps des actions de formation et d’éducation libératrice. Dans quelle mesure les programmes que vous menez dans ce domaine peuvent aider à une prise de conscience des populations sur les enjeux politiques de cette crise ?

Dans des situations de crise comme celle que nous sommes en train de vivre aujourd’hui, et de façon plus poussée au Brésil, les processus de conscientisation permettent d’aider la jeune génération à mieux comprendre les causes structurelles des inégalités. En cette période de quarantaine, nous avons été dans l’obligation de suspendre toutes les activités scolaires. A travers le contact direct ou virtuel avec les élèves, il a été possible d’adopter une posture plus réfléchie et mature. La participation à des initiatives de solidarité qui ont vu le jour un peu partout a démontré l’efficacité du travail éducatif.


Retrouvez toutes nos interviews "3 Questions à...." ci-dessous :
→ Poppy John Xavier, coordinatrice d’équipe à Kudumbam (Inde)
Beron Molantoa, Directeur d'Emmaüs Cordis (Afrique du Sud)

Carina Aaltonen, Présidente d'Emmaüs Europe